VD : Régis Chevallier, 3 choses ou plus que vous aimeriez que l’on sache de vous ?
J’ai 42 ans et je suis installé comme maraîcher depuis 7 ans. J’ai un parcours atypique. Je n’étais pas destiné à être maraîcher : je suis fils d’un informaticien et d’une maman, qui était secrétaire à la DDE. En revanche, j’ai toujours aimé les plantes et j’ai fait des études en biologie et environnement. Je peux dire que je suis rentré dans le maraîchage par hasard, c’était mon premier boulot ! J’étais technicien et je suis tombé dedans par passion, il y maintenant vingt ans ! Ce qui me motive, ce sont les relations humaines et j’ai vraiment trouvé cela dans le maraîchage. Cela répondait complètement aussi à ma nature ouverte, enthousiaste et curieuse de tout ! Et parallèlement, je me suis vite rendu compte aussi que j’aimais gérer et que j’avais besoin d’être patron !
VD : Vous avez été élu à la présidence de la Fédération des Maraîchers Nantais en 2018. Comment concevez vous votre fonction de président ?
Notre fédération a un rôle de représentation et de défense de la filière maraîchère. Elle se doit de porter la voix de tous ses adhérents, en toute autonomie, pour faire avancer nos projets. Mon rôle de président s’articule donc autour de deux grandes missions : d’une part, le diagnostic des problèmes remontés du terrain, d’ordre juridique, technique ou social : par exemple des problèmes de voisinage et de leurs solutions et d’autre part, de la défense de nos membres. Je me vois comme un connecteur qui fait le lien entre les différents acteurs du territoire et qui trouve dans le collectif des réponses à tous nos enjeux économiques, environnementaux et sociétaux. Une filière a besoin de cohésion, cela exige beaucoup de proximité, beaucoup d’écoute : chaque adhérent doit se sentir soutenu par sa fédération et proche d’elle. J’ai à cœur de faire perdurer ce qu’on faisait déjà et de faire avancer les choses collégialement en mettant les bonnes personnes autour de la table.
VD : Vous parlez de votre travail passionnant, mais aussi très prenant, où il faut être très disponible, je me pose la question : comment font vos collègues maraîchères pour tout gérer ?
Quand tu es installé maraîcher, femme ou homme, c’est un métier tellement exigeant en termes de temps passé, de diversification des enjeux, que tu sais parfaitement dès le départ que tu ne feras pas 35 heures hebdomadaires ! C’est un métier qui ne te lâche pas, qui ne te laisse pas tranquille une minute, car tu dois régler de nombreux sujets. Cela passe par la gestion des personnels – nous avons beaucoup de saisonniers – des problématiques environnementales à la mise en place de nouvelles réglementations en plus de notre travail lié aux cultures. Le maraîchage a toujours été une activité où le groupe est important, je parle souvent de « travail en bande » ! Les femmes ont toujours été impliquées et nous comptons beaucoup de collaboratrices dans nos équipes. Les femmes de notre filière savent ce dans quoi elles s’engagent. Je vois aussi comment elles réussissent à s’organiser et à s’appuyer sur des collaboratrices et des collaborateurs pour soulager leur charge de travail et alléger leur emploi du temps.
VD : Vous avez souligné le soutien fondamental que votre femme vous apporte dans tout ce que vous entreprenez en prenant en charge la partie domestique et la gestion au quotidien des enfants. Certaines des maraîchères de votre entourage sont mères de famille… Pensez-vous qu’elles pourraient, comme vous, se porter candidates à un poste d’administratrice dans la Fédération par exemple ou à la coopérative ?
Quand nous avons discuté avec vous et mes collègues maraîchères, cela m’a sauté aux yeux. Bien sûr, que j’avais conscience que la charge familiale repose totalement sur les femmes. Mais, en les écoutant dire combien cela les bloquait pour s’engager, j’ai saisi l’importance de ce frein à leur engagement. Jusqu’alors, je ne faisais pas la corrélation entre charge familiale et engagement. De plus, dans notre fédération, notre fonctionnement est assez traditionnel avec les réunions le soir, par exemple… Mais je sais qu’on peut faire évoluer notre fonctionnement avec des horaires plus adaptés, moins tardifs. Et puis au-delà de la question femme/homme c’est aussi et surtout la place des enfants qui est prégnante. Les mentalités changent et il parait normal aujourd’hui qu’un homme prenne en charge le quotidien familial de façon à laisser sa compagne s’investir dans sa carrière.
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