Quel mot intéressant que celui d’«engagement». Au Moyen Âge, l’engagement symbolisait l’idée de « mettre en gage » un objet pendant une certaine durée. Dans son sens figuré, il exprimait l’idée d’entrer dans un passage étroit, et par extension, « qui ne laisse pas libre », d’où le glissement sémantique pour désigner l’engagement militaire. Son étymologie croisée influence vraisemblablement l’impression ambivalente que l’on a de ce mot : il séduit et fait peur à la fois. Ainsi, on parle de plus en plus de crise de l’engagement. Les quatre piliers de l’engagement – implication, satisfaction, promotion et fierté – se voient ainsi fortement ébranlés dans tous les domaines : professionnel, syndical, associatif ou personnel. Mondiale, cette crise de l’engagement fragilise, voire sape, la bonne marche des institutions comme des entreprises : seuls 6 % des salariés français affirment ainsi faire leur travail avec engagement, selon l’enquête Gallup 2022.

Les instances syndicales agricoles n’échappent bien évidemment pas au délitement général de l’engagement. José Jaglin, secrétaire général chez Jeunes Agriculteurs 22, affirmait déjà en 2018 : « Nous sommes moins nombreux et les forces vives sont éclatées dans nombre d’associations que ce soit au niveau social ou professionnel, sans compter la volonté de disposer plus de temps pour soi au niveau familial… Les coopératives agricoles font le même constat ».  Il n’y a pas seulement un problème de renouvellement de génération, dû au départ massif des baby boomers (nés entre 1943 et 1960), il y a un phénomène général de désaffection pour l’engagement et ses contraintes. Or, l’engagement est déterminant dans toute entreprise ou institution.

En interpelant la 121ème promotion d’étudiants de l’Esa, l’Ecole supérieure des agricultures d’Angers dont elle est la marraine, avec ces mots « Aimer, c’est s’engager », Anne-Cécile Suzanne, agricultrice et consultante, le rend plus accessible, car plus familier. « S’engager n’a donc rien d’exceptionnel. Et ça a quelque chose d’incroyablement positif : il n’y a pas de doute, nous savons tous, chacun, nous engager… Ressentir de la joie dans ce qu’on fait est la clé que l’on s’est engagé dans le « bon » chemin, bon pour soi. »

Et vous, avez-vous aussi ressenti cette joie qui vous a fait vous engager ? Vous sentez-vous engagée, engagé ? C’est quoi votre définition de l’engagement ?