VoxDemeter avait donné rendez-vous aux visiteurs du salon international de l’agriculture et à ses adhérents le 3 mars dernier sur le stand de notre partenaire, Agridemain pour un débat intitulé “Métiers du vivant, carrières au féminin”. Autour de la table, un beau panel d’intervenants passionnés pour parler renouvellement des générations, transition alimentaire et sociétale et mettre en exergue la manière dont les femmes dynamisent l’image et la perception des métiers agricoles.
Anne-Marie Vaudon, viticultrice et bouilleuse de crû en Charente, Vice-présidente de la Chambre d’agriculture de son département, s’est installée en 2005 avec son beau-père. “Les mentalités ont changé en quinze ans… Il y avait alors très peu de femmes à venir aux réunions, elles restaient invisibles. Il y avait un vrai décalage générationnel aussi, des automatismes ou des représentations sociales très fortes dans notre filière. Je me suis beaucoup reconnue dans la bande dessinée de Maud Bénézit & Les Paysannes en polaire “Il est où le patron ?”. Et puis, de plus en plus de femmes et de jeunes filles de viticulteurs se sont installées. Et aujourd’hui, nous fonctionnons toutes plus en réseaux, comme le prouve ce livre qui vient d’être édité : “Femmes du cognac, de l’ombre à la lumière”. Sur mon exploitation j’embauche aussi des salariés plus jeunes que moi, qui ne font pas de différence de traitement que l’on soit un homme ou une femme.”
Une tendance confirmée par Alexia Rey, co-fondatrice de NEOFARM, start-up proposant des fermes maraîchères bio et technologiques et elle-même, “NIMA” (non issue du monde agricole). “Les nouvelles générations sont attentives à la solidarité et à l’entraide avant tout.” témoigne-t-elle en encourageant aussi les femmes à rejoindre des réseaux dédiés…Très important dans l’AgTech qui est encore un secteur très masculin… tout comme l’agriculture et l’agro-alimentaire !
“De moins en moins” selon la nouvelle Directrice de l’IHEDREA, Albena Gadjanova, qui a rappelé que l’école avec ses 70 ans d’existence, compte 400 élèves répartis sur 3 campus, dont 43% d’étudiantes dans les effectifs et 15% environ de “NIMA” (non issu du milieu agricole). Unique dans le paysage éducatif français, l’Ihedrea conjugue droit, droit rural, management, économie. Et beaucoup de jeunes filles trouvent dans ces matières enseignées un véritable attrait, les amenant à faire de belles carrières dans ces deux secteurs.
Pour sa part, Bastien Boudet, jeune ingénieur ayant rejoint l’équipe d’ELOI – qui accompagne les agriculteurs cédant leurs fermes et des repreneurs ayant un projet agroécologique – a souligné que beaucoup de projets sont portés par des femmes. Sur les six projets d’installation soutenus par ELOI ayant abouti, trois sont féminins, dont une chevrière en Maine et Loire, elle-même NIMA. Quête de sens, qualité de vie, envie de transmettre : autant de valeurs fortes qui motivent aujourd’hui ces nouveaux agriculteurs et agricultrices, que Bastien pourrait bien rejoindre un jour en s’installant à son tour.
Arrivée au coeur des discussions, Christiane Lambert, alors Présidente de la FNSEA et Présidente du Copa a tenu tout d’abord a redonner quelques chiffres sur la place des femmes en agriculture, rappelant que le mot “agricultrice” n’est entré dans le dictionnaire qu’en 1961. Très attentive aux témoignages des autres intervenants sur les (fameuses) attentes professionnelles et personnelles des nouvelles générations, elle a aussi évoqué non sans plaisir et émotion son enfance à la ferme dans le Cantal, sa maman, agricultrice, qui lui a donné très tôt l’envie de faire ce métier. A quelques jours de la fin de son mandat à la FNSEA, elle a rappelé fort justement que la vie des femmes est faite de séquences, marquées par exemple par la maternité et d’autres moments clés, dans un monde du travail où les carrières sont pensées sans rupture. Son message : Osez ! Osez l’entreprenariat agricole, les carrières du Vivant, osez prendre des responsabilités dans les instances agricoles, acceptez de dire non quand il le faut, et restez passionnées ! Un moment fort et inspirant pour tous les participants de ces échanges.
Béatrice Collet, Secrétaire générale de l’association Vox Demeter et issue d’une longue lignée agricole de la Marne, a tenu à souligner la qualité de vie en agriculture et dans le monde rural, un critère important pour les candidats à l’installation et que l’on évoque trop rarement. « On parle de risques climatiques, de lourdeurs administratives, d’agressivité envers les “agri pollueurs” … mais il serait plus que nécessaire de rappeler qu’être agriculteur et agricultrice a des atouts indéniables que les citadins n’ont pas : de l’espace, des parents – et des grands-parents – souvent présents à proximité, la possibilité d’avoir ses enfants à table le midi et tôt le soir… Des plaisirs simples mais tellement importants ! » Des propos confirmés par les agricultrices, présentes autour de la table d’hôte.
Laisser un commentaire