L’agriculture compte de nombreux groupes d’agricultrices, réservés exclusivement aux femmes. Nés dans les années 70, ceux-ci se sont d’abord développés autour des revendications sur le statut professionnel de la femme en agriculture. Ils ont ainsi fortement contribué à améliorer la reconnaissance du travail des femmes en agriculture et à stimuler, chez elles, la nécessité de se former. Essentiel à la défense des droits des agricultrices et des femmes, ces collectifs jouent un rôle-clé d’une part, en termes de partage de savoir-faire et d’autre-part, comme vecteur de sociabilisation, pour sortir du quotidien et tout simplement de la ferme. Karine Benhamou-Taupin des Elles de La Terre le confirme « On a le droit de penser à autre chose qu’à notre travail ! “. Ces groupes d’échanges ne se résument pas à des espaces de convivialité : ils favorisent souvent la parole et apportent aussi du réconfort.
Avec Terre de Femmes, on entre dans une catégorie plus entrepreneuriale du réseau. Sandrine Labbé, sa créatrice (ci-contre), le confirme : « Ce réseau répond à un besoin : celui de se rassembler autour d’un savoir-faire et d’un leadership, parce qu’on fait le même métier et qu’on bâtit les mêmes projets. C‘est également l’occasion de partager ses expériences et surtout, les bonnes idées ! »
VD : Sandrine Labbé, comment vous est venu l’idée de Terre de Femmes ?
” C’est en se rendant compte de la place importante des femmes dans l’agriculture dans notre département, que notre association Et pourquoi pas elles ? a eu l’idée de créer le réseau Terre de Femmes. Il est vrai que j’avais déjà l’expérience des réseaux professionnels féminins, car j’ai d’abord monté un réseau pour promouvoir les études scientifiques et techniques auprès des jeunes filles, que j’ai animé pendant dix ans. L’objectif était de les motiver pour ces métiers, réputés masculins. C’est grâce à des portraits photographiques de femmes scientifique que sommes parvenus à montrer qu’elles existaient et qu’elles avaient des responsabilités… Par la suite, j’ai créé le premier réseau de femmes cheffes d’entreprise en Mayenne. Terre de Femmes est né de ces deux expériences et du constat suivant : la Mayenne est l’un des départements où l’agriculture et l’agro-alimentaire tiennent une place significative sur le plan économique. De plus, dans notre département, 30 % de femmes dirigent une exploitation, oui, 30 % sont aux manettes.* C’est plus qu’au niveau national !“
VD : Comment se positionne Terre de Femmes et que va-t-il apporter concrètement aux agricultrices de Mayenne ?
« Notre axe est résolument professionnel. La seule condition c’est d’être une femme agricultrice pour en faire partie. Nous aurons des réunions régulières, comme dans tous les réseaux. Nous voulons d’abord montrer qui sont ces agricultrices à travers des portraits… Il faut que les jeunes filles puissent s’identifier. Montrer qu’elles réussissent, qu’elles font peut-être différemment que les hommes ou que dans leur façon de travailler, elles apportent quelque chose de différent, ce que démontrent certaines études… Ensuite, c’est de les inciter à prendre le micro dans les médias ou à présenter leurs produits dans les concours. Tout cela participe à se valoriser et à redonner de la fierté ! Par ailleurs, ce réseau va permettre de résoudre des problématiques communes en partageant les expériences, bonnes ou mauvaises, les astuces… et puis, il doit pouvoir renforcer l’ambition : çà, je peux y arriver ! et aussi, permettre de passer des caps : se payer mieux, embaucher, externaliser etc… Et comme Terre de Femmes est un réseau Business, l’objectif est, bien évidemment, de faire progresser les chiffres d’affaires et l’entreprise de chaque agricultrice…”
VD : Quelle est votre ambition pour Terre de Femmes ?
“Expérimenté au niveau de la Mayenne, ce réseau a vocation à devenir régional et national. A court terme, nous projetons d’en faire un label pour les consommateurs-citoyens, qui achèteront un produit Terre de Femmes pour soutenir le travail d’une agricultrice. Cela donne tout son sens à ce réseau.“
Retrouvez deux portraits Terre de Femmes
* Donnée non vérifiée
Quelques réseaux de femmes parmi tant d’autres (par ordre alphabétique) :
Agriculture au féminin de Rés’agri Aven Laïta dans le Finistère
Commission Nationale des Agricultrices
GVA les Natur’elles, animé par la Chambre d’Agriculture de l’Orne
Pour aller plus loin sur les réseaux d’agricultrices, quelques éléments parmi d’autres :
Clémentine Comer « Entre agricultrices ? Les incidences équivoques d’un engagement non mixte », Métropolitiques, 8 mars 2021.
Agrigenre : Ione Jackson Wall, Quelle place pour les femmes dans l’agriculture en Pays Basque Nord ? AgriGenre, février 2022.
Article de Lucie Fagais sur le Civam 44
Le mémoire de Flora Dupuy pour l’obtention de son master : Le rôle des groupes en non-mixité choisie de femmes – Etude sur des groupes de femmes de CIVAM locaux
[…] également. Les Fa’bulleuses de Champagne , Les Winneuses de la Loire ou les adhérentes de Terres de femmes se retrouvent régulièrement pour des rencontres entre femmes. D’autres choisissent de […]